L’or est le métal précieux qui a toujours fasciné l’humanité par sa belle couleur dorée, par sa densité, par la facilité avec lequel il se travaille et par sa résistance à l’usure du temps.
J’ai eu la chance, comme ingénieur géologue, géochimiste de pouvoir piloter des projets d’exploration, tout d’abord en pleine forêt tropicale d’altitude sur la crête Zaïre Nil en 1977 et ensuite dans le grand désert d’Arabie en 1982, pays de la reine de Saba et terrain de jeu des prospecteurs du roi Salomon.
Deux environnements totalement différents : le premier abrite une forêt primaire d’altitude (2400m) magnifique, véritable château d’eau du Rwanda, le second, très chaud et aride, est beaucoup plus vaste, regs de pierres alternant avec des dunes et des harrats (plateaux volcaniques).
Quel que soit le contexte, la démarche du prospecteur est identique : sélectionner une zone favorable pour y développer des méthodes d’approche adaptées. Au Rwanda, il s'agissait d'un secteur alluvial riche en or aux sources de la rivière Nyungwe (rivière toujours exploitée par des artisans). En Arabie, il s’agissait de secteurs à forte densité en petites mines antiques dispersées sur une large pénéplaine.
L’étape suivante est la recherche des sources primaires de l’or exploité et, comme les détectives, le géologue va remonter à l’amont des rivières et sur les versants à la recherche d’anomalies : teneurs anormales en or dans les sols pour ensuite identifier la source par tranchées et sondages. Au Rwanda, dans le cadre d’un projet financé par le PNUD et avec le support du ministère local, nous avons pu appliquer l’échantillonnage en maille carrée à forte densité avec analyse sur place de l’or (limite de détection 5ppb) et de ses traceurs directs. Cette technique a permis de localiser un nouveau filon aurifère, source que les anciens colons n’avaient jamais pu localiser en restant dans les vallées. Malheureusement cette ressource s’avèrera infra économique au cours de l’or à l’époque (150$/oz).
En 1982, le climat désertique nous posait un nouveau challenge. Impossible d’appliquer les méthodes du milieu tropical. Sur le plateau arabe les sols sont souvent absents et les rares oueds sont à sec, ce qui réduit leur capacité de transport pour l’or particulaire. En observant les tempêtes de sable et les "sorcières" fréquentes sur le reg, une idée a germé : en l’absence d’eau pourquoi ne pas utiliser les fractions du sol transportées par le vent ce qui élargirait les halos autour des cibles primaires.
Une question cruciale : quelle fraction du sable est la mieux adaptée à concentrer le faible signal d’or dispersé autour des gîtes sur le reg. Un premier essai avait conclu à l’utilisation d’une fraction grossière, celle-ci étant plus lourde restant plus autochtone, donc plus proche de la cible. La géochimie utilisant cette fraction a été un échec, dû à la trop grande hétérogénéité de ces matériaux et à la trop faible quantité de matériel prélevé. J’ai donc repris des études de dispersion de surface pendant 3 ans autour de cibles aurifères connues, ou de nouveaux indices découverts par géochimie de surface. La conclusion surprenante de ces tests a permis de définir la fraction la plus fine (<60µm) comme la plus efficace pour localiser les gisements cachés. En l’absence de drainage dans les regs plats, nous avons pu mettre au point une nouvelle méthode de prélèvement à large maille (1km x 1km) en composite.
Cette méthode a donné des premiers résultats sur place et de nouveaux types de minéralisation identifiés. Malheureusement, la mission en Arabie se terminait sans avoir pu généraliser l’application de cette méthode. Douze ans plus tard, appliquée par les équipes du BRGM dans le nord de la Mauritanie, en contexte analogue, elle a permis la découverte d’un très beau gisement d’or : le gisement de Tasiast. Dans ce même pays, plus au sud, nous avons pu faire une belle découverte en utilisant cette fois la méthode traditionnelle de prospection à la battée.
En conclusion, le prospecteur moderne dispose aujourd’hui d’une large panoplie d’outils très performants (analyseur portable pour la géochimie mais aussi radar, synthèse par GIS, géophysique aéroportée, spectro aérienne, etc…). Ces techniques devraient permettre un renouvellement du portefeuille minier des grandes et moyennes compagnies pour répondre à une demande toujours croissante de ce métal dont les prix flambent.
Dr Ignace Salpeteur, ingénieur géologue, géochimiste, BRGM
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Illustration : Image par Savana Price de Pixabay
Centre•Sciences en partenariat avec les organismes de recherche du Loiret
Dr Ignace Salpeteur, ingénieur géologue, géochimiste, BRGM
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