Le 7 novembre 1492 à Ensisheim en Alsace une explosion se fait entendre à plusieurs kilomètres et le ciel s’illumine ! Une météorite de plus de 100 kilogrammes vient de s’écraser dans un champ. A l’époque ce phénomène est interprété comme un signe divin et on ne connaît pas l’origine de ces pierres qui tombent du ciel. La première analyse par des méthodes scientifiques et chimiques concerne la météorite de Lucé en 1768 avec une composition riche en fer et en soufre. L’origine du phénomène serait due au tonnerre et à l’impact d’éclairs sur les roches. En 1794 le physicien Chladni défend l’idée que ces pierres proviennent de l’espace et que les phénomènes lumineux viennent de la chaleur dégagée par friction dans l’atmosphère. Il faut attendre la chute de l’Aigle le 26 avril 1803 en Normandie avec plus de 3000 fragments retrouvés au sol et le rapport de Jean-Baptiste Biot pour définitivement mettre fin à la controverse.
Chute de la météorite d’Ensisheim, Albrecht Durer-1512.
Figure de regmaglyptes. L’échauffement dans l’atmosphère provoque un phénomène de fusion et d’évaporation. La surface fondue cristallise en une croûte noire d’1 millimètre d’épaisseur. MNHN.
Aujourd’hui des milliers de fragments sont répertoriés dans des collections principalement dans les muséums d’histoire naturelle et laboratoires de recherche. Ainsi le muséum de Vienne en Autriche constitue la plus grande collection au monde avec plus de 10000 échantillons. En France 78 chutes au sol ont été recensées et seulement 1155 chutes ont été observées directement dans le monde. La taille des météorites varie de quelques microgrammes à plusieurs tonnes comme la météorite d’Hoba en Namibie avec 60 tonnes. L’impact au sol peut ainsi donner naissance à un cratère de quelques centimètres à plusieurs mètres ou kilomètres pour les très grosses météorites dans l’histoire de la Terre. On dénombre actuellement plus de 200 impacts de météorites dont on conserve une trace géologique malgré l’érosion.
Météo Crater ou canyon du Diable dans le désert de l’Arizona, causé par la chute d’une météorite estimée à 60m de diamètre il y a environ 50 000 ans. Cratère de 1250 mètres de diamètre sur 175 mètres de profondeur.
L’origine ne fait plus de doute et les météorites proviennent du système solaire. Une grande majorité des météorites possède une composition identique à celle du Soleil, si on ne compte pas les éléments volatils (Hydrogène, hélium, azote, gaz rares). Cela prouve que ces météorites proviennent de la nébuleuse primitive qui a formé le Soleil et le système solaire.
Elles constituent de véritable « pierres de Rosette » permettant de mieux comprendre la formation du système solaire. Il est donc important de les analyser rapidement après leur chute afin de ne pas être polluées par des éléments terrestres.
La classification des météorites n'est pas toujours aisée. La quantité de fer est un premier critère mais pas seulement. 4,5% des météorites sont ferreuses, 94,5 % des météorites sont pierreuses ou rocheuses et 1% sont mixtes. La différentiation constitue un critère essentiel concernant le corps d'origine dans l’espace. Lorsque les corps célestes, astéroïdes, atteignent une certaine taille de plusieurs centaines de kilomètres alors la chaleur interne commence à différencier les éléments. Le métal dense plonge au cœur de l’astéroïde. Des éléments plus légers forment un manteau et une croûte rocheuse. Lors de collisions les différentes parties se retrouvent dans l’espace interplanétaire et peuvent finir par tomber sur Terre ou d’autres planètes (catégorie des achondrites, sidérites, pallasites).
Figures de Widmanstatten, structure interne typique de météorites de la catégorie des sidérites révélées par l’acide nitrique. CS.
Les plus petits corps sont non différenciés (chondrites) et constituent près de 87% des météorites. Elles sont très différentes des roches terrestres et ont une composition similaire à celle du Soleil. Des structures de chondres, petites sphères, ont été formées dans la nébuleuse primitive. L’analyse des inclusions ont permis de dater le début du système solaire à 4 567 millions d’années !
La différentiation des météorites. MNHN.
Le dispositif Vigie-ciel
Des objets et cailloux pris pour des météorites sont courants. Il s’agit très souvent d’oxydes de fer, de minéraux riches en pyrite, fer, magnétite. Mais la chance de trouver une véritable météorite est faible. Cependant le réseau Vigie-ciel porté par le Muséum National d’Histoire Naturelle avec le dispositif FRIPON initié en France de plus d’une centaine caméra permet aujourd’hui d’observer le ciel en permanence et détecter des météores (étoiles filantes) très lumineux et ainsi la chute possible d’une météorite*. L’observation conjuguée de plusieurs caméras permet de définir une zone probable de l’impact au sol. Ainsi, suite à l’observation de la rentrée dans l’atmosphère de l’astéroïde 2023 CX1 en Normandie le 13 février 2023 à 3 h 59 mn du matin, l’équipe FRIPON/Vigie-ciel a rapidement mobilisé son réseau pour mettre en place une recherche sur le terrain. Une première équipe de chercheurs et d’amateurs passionnés a permis de retrouver un fragment qui a été confirmé par analyse.
Météorite retrouvée en Normandie le 13 février 2023
Pour en savoir plus :
• https://www.vigie-ciel.org
• Les météorites, Carnets d’histoire naturelle, Edition Bordas
• Météorites, entre ciel et terre, Edition MNHN
• Impacts, des météorites aux cratères, Edition Belin
* Attention, ne pas confondre le météore, phénomène lumineux ou étoile filante visible à l’œil nu et la météorite qui constitue le fragment tombé au sol.
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